Sherlock le Marocain : Jour 10 - De l’autre côté du désert

février 14th, 2009 by Sherlock
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Et voilà que ce blog renait une fois de plus. Il a cette fois ci fait les frais de mon déménagement et des travaux qui l’ont accompagné (mais je vous raconterai ça un peu plus tard). Je reprends avec plaisir mes activités laissées en friche juste avant le grand chambardement. Il y a tout juste 1 an nous revenions du Maroc des photos et des souvenirs plein la tête. Déjà 1 an et je n’ai toujours pas fini de tout vous raconter. Pourtant les 2 derniers jours ont sûrement été les plus riches de tous…

- Récit par Sherlock -

11/02 : Ce matin, nous nous levons très tôt. L’expérience du jour risque d’être forte en émotions puisque nous nous apprêtons à défier la circulation marocaine, ses attelages, mobilettes et son code de la route si respecté en louant une voiture. Direction : Essaouira !


Mais avant de partir une nouvelle fois à l’aventure, faisons rapidement un petit bilan : dans notre chambre du riad, nous avons 4go de photos prises à ce jour, deux sacoches, deux sacs à dos, un portefeuille  en cuir, des dattes, un panier en osier, des étoffes de toutes les couleurs et un djembé. Quant-aux habitants des lieux, nous avons pour ma moitié : une ex-tourista, un gros rhume et une toux qui vire au gras. Pour le Sherlock,  une migraine ophtalmique sévère résolue et un bon rhume aussi fiévreux que celui de sa douce. Bilan dans la pharmacie de voyage : le paracétamol devient une denrée rare et nous nous partageons la boîte d’actifed jour et nuit en l’entamant par les deux bouts. Ce matin là nous partons donc bien amochés, l’œil vitreux et le mouchoir au nez.

C’est donc au volant d’une clio que nous prenons la route vers 9h30. 2h30 et 196km  de voiture seront nécessaires pour rejoindre cette ville côtière très typique du bord de l’atlantique.


Me voici donc au volant à devoir sortir de Marrakech. Une seule règle : s’imposer ! Une seule compétence nécessaire : des réflexes ! Les mobilettes nous passent devant, les deux voies se transforment en trois ou quatre voies selon le bon plaisir des conducteurs, les coups de klaxon fusent y compris lorsque les feux sont rouges… Nous voilà donc au beau milieu d’un kafarnaüm indescriptible . Ma copilote regarde le bord de la route à la recherche de panneaux routiers et moi je fais preuve de … réflexes. Après avoir pris une fois la mauvaise direction nous nous retrouvons sur la route d’Agadir et Essaouira… A partir de là c’est tout droit jusqu’à la côté !

Sortir de Marrakech est assez long et éprouvant pour les nerfs. La banlieue s’étire assez loin et ce sont autant de mobilettes, mules et personnes à éviter en plus. Plus loin, nous ressentons cette impression de chantier géant, tout a l’air en travaux, à l’étape de l’ébauche. Parfois des hommes travaillent au milieu de nul part à un mystérieux chantier.

Le ciel est assez gris et nous avons vu quelques gouttes de pluie avant de partir de Marrakech ; le désert approchant, cette grisaille se transforme en un ciel blanc très lumineux qui écrase le paysage. Au long de notre route, nous rencontrons très souvent de jeunes bergers avec leurs moutons ou leurs chèvres qui paissent le long de la chaussée. L’herbe se raréfie et même les très nombreux oliviers des quelques dizaines de premiers kilomètres ont laissé leur place à de la caillasse. Sur le bord de la route, des murs ocres mangés par le désert délimitent des terrains sur lesquels on trouve le plus souvent du rien.


Ma moitié se sent fiévreuse. De mon côté je suis heureux que la route soit globalement dégagée car mon rhume rend la conduite plus fatiguante. Nous passons les portes de la ville de Chichaoua. A chaque carrefour se trouve un ou plusieurs policiers dont on peut penser qu’ils servent de feux rouges et de contrôleurs de la route. Ils sont globalement bien passifs et dévisagent nos têtes de touristes au passage de notre voiture de location.

Chichaoua est une véritable ville relais, c’est ici que la route se sépare en deux : à gauche Agadir, à droite Essaouira. C’est aussi la ville qui marque la véritable entrées du desert : derrière le contrôle de la police du royaume qui marque la sortie de la ville se dessine une terre rocailleuse et d’énormes collines de pierre. C’est donc cette route, moins confortable, que nous suivons.

Au milieu de nul part, nous croisons des hommes provenant d’on ne sait où pour aller quelque part. Mais où ? En bon touriste, je m’arrête pour photographier des dromadaires. Il faut savoir que j’ai eu les plus grandes difficultés à prendre des photos des gens  à Marrakech. Je me dis donc à ce moment là que le désert sera plus cool et puis ces dromadaires m’ont l’air bien seuls. Je prends donc l’appareil photo resté dans le coffre, je démarre l’engin et m’éloigne de la voiture de quelques pas pour faire une photo d’ensemble (NdSherlock : oui oui celle juste là en dessous qui n’est même pas belle).

A peine la photo prise, une camionnette que je n’avais pas vu se met en branle et  homme surgit de nul part vers moi. D’un pas nonchalant et sans m’affoler je me retourne puis parcoure les quelques mètres qui me séparent de la voiture. Je m’assois à la place du conducteur avec l’appareil sur les genoux puis démarre avant que l’homme n’arrive au niveau du coffre. Dans le rétroviseur je le vois alors faire de grands gestes de mécontentement montrant son agacement. Je pars comme un voleur sans avoir pourtant l’impression d’avoir fait quelque chose de répréhensible.

La route se poursuit et nous paraît longue. Nous traversons quelques petites villes souvent construites aux abords d’un oued asséché.

Après presque deux heures de route, le paysage semble reverdir et se vallonner. A ce moment je me dis qu’il s’approche de l’idée que je me fais de la Toscane. Des prairies vertes mais toujours caillouteuses, des arbres avec parfois des chèvres blotties dans les feuillages, des oliviers, des tilleuls… Nous approchons de la côte !

Nous ne voyons pas la mer et ce n’est qu’une fois arrivés sur la dernière colline surplombant Essaouira que nous profitons d’un spectacle rare : sous le soleil retrouvé du bord de mer, une ville blanche se détache sur des rochers abruptes. A côté une immense baie accueille une plage à l’abri des vagues de l’Atlantique.

Nous approchons de la ville et nous garons aux abords des remparts. Je paye le gardien 20 dirhams pour qu’il prenne soin de notre voiture puis nous nous dirigeons vers le port où nous comptons bien bénéficier des bienfaits de la mer pour remplir nos estomacs vides. Nous avons quitté Marrakech à 9h30 et il est déjà midi. Nous longeons donc la plage puis les remparts pour arriver au port. De mes yeux de photographe j’ai rarement vu port aussi photogénique. Empêchant mon binôme de répondre immédiatement à l’appel de la faim, j’entreprends déjà de faire quelques photos.

La zone de calle sèche est active et des hommes sont à l’ouvrage pour la rénovation des chalutiers.

En face dans le port des dizaines de chaloupes couleur bleues sont stationnées à l’arrière de la zone des chalutiers.

De l’autre côté du port, sur le débarcadère, des dizaines d’hommes s’affairent autour de chaloupes ramenant certainement le produit de la pêche du matin.

J’ai une furieuse sensation de port breton. Cet endroit littéralement innondé de mouettes me rappelle une version romantique de la Bretagne (avec en plus le beau temps).


Au bout du port se trouve un restaurant vendant les produits de la pêche locale. C’est une grande bâtisse dont on a l’impression qu’elle été construite avec des morceaux des bateaux du port. Sur la pancarte est écrit “chez Sam”. C’est donc l’ami Sam qui nous régale de calamars grillés alors que les chiens jouent bruyamment sur le toit à essayer d’attraper les mouettes.

Sortis de notre repas, nous traversons le port puis passons l’une des portes des remparts qui mène à la médina. Derrière cette porte, deuxième claque visuelle : des murailles abruptes couleur ocre protègent la médina d’une mer “bretonne” ( comprendre des récifs ciselés sur lesquels viennent s’écraser les énormes vagues de la marée montante) derrière cette protection une ville aux murs blancs sur lesquels se détachent des fenêtres du même bleu intense (d’ailleurs pas très loin du bleu du jardin majorelle) que celui des chaloupes. Devant ce tableau à faire pleurer un photographe en manque de couleurs s’agitent des centaines de mouettes question de donner vie à la toile.

Déjà là j’ai l’impression de disposer de l’un des endroits les plus photogéniques qi’il m’est été donné de voir. Après quelques photos où ma chère et tendre fait ami-ami avec une mouette, nous passons la porte suivante en direction du rempart de la médina donnant sur l’océan.


Nous sommes médusés de voir un tel endroit, une collision irréelle entre une plage ressemblant aux plus belles de la Costa Brava, des falaises et un port certifiées 100% Bretagne et des maisons aux murs aussi blancs que certains villages du sud de l’espagne.

Une ruelle coincée entre le blanc des maisons et l’ocre du rempart nous mène à une rampe d’accès au large chemin de ronde.

Derrière la muraille crénelée son disposés des canon espagnols dirigés vers l’océan. Nous remontons le rempart jusqu’au bastion nord pour profiter d’une vue magnifique : d’un côté la médina défiant la mer, de l’autre l’Atlantique qui fait mousser ses grosses vagues sur les récifs.

Après avoir bien profité de la vue, nous reprenons une ruelle puis une rue qui nous mènent vers l’axe principal de la Médina où l’on trouve boutiques, gargottes ou marchands de fraises ambulants.

L’ambiance est bien plus calme qu’à Marrakech puisqu’aucune voiture ne circule dans la Médina. J’ai toujours des problèmes pour prendre des photos des gens.. J’essaye donc le shoot à l’aveugle avec l’appareil contre le torse question de me fait discret. Et parfois ça marche !

C’est ainsi que nous remontons puis redescendons la rue principale de cette agréable cité balnéaire. Ma moitié aime sentir le bord de mer, son soleil particulier et le calme qui règne ici par rapport à la bruyante Marrakech. Moi, ben moi je fais des photos pardi ! Le blanc, le bleu, le ciel azur offre des compositions souvent intéressantes.

Après environ 1h30 de ballade, nous nous décidons pour une terrasse à l’ombre où nous voyons une petite mamy française tenir tête à un serveur bien maigrichon sur le prétexte que le thé à la menthe contient trop de feuilles de menthe. Elle partira en lui payant “ce que ça vaut vraiment”. Nous quittons ensuite la médina pour la plage. Nous posons notre serviette et ma moitié entreprend très vite une petite sieste bronzette. De mon côté, je suis souvent sollicité par les marchands ambulants. L’un d’entre eux me proposera même des spaces cakes !

Je m’amuse à prendre quelques photos de la plage et des jeunes qui s’y amusent. Quelques personnes se baignent tandis que d’autres longent la côté les pieds dans l’eau ou se font bronzer. Trois petits chiens viennent faire les modèles pour moi pendant qu’Elle goûte pleinement le soleil des côtes marocaines.



Nous quittons Essaouira à regrets vers 17h30 et reprenons la route vers Marrakech le soleil couchant dans le dos.


Le chemin du retour aura été une véritable épreuve pour les nerfs. Tant qu’il fait jour tout va bien mais la nuit tombante révèle de nouveaux pièges. Je commence par me faire arrêter par un agent de police pour excès de vitesse : pour ma défense votre honneur je dirais que jamais je n’ai vu le panneau de limitation et que l’agent n’avait pas de radar. Comment a-t-il pu estimer ma vitesse, cela reste une énigme. Voyant que je suis français il me laisse repartir en faisant appel à ma prudence dans un français approximatif.

C’est donc un peu échaudé que je reprends la route alors que la nuit montre vraiment son nez. Seulement voilà, la nuit circulent toujours piétons, carioles, mobilettes et voitures sans feux. Il me faudra donc faire preuve de vigilance.


Les choses se corsent de nouveau lorque nous atteignons Chichaoua et la jonction avec la route provenant d’Agadir. Là d’énormes camions avec des chargements de toutes sortes se mèlent à la circulation. Tous se doublent se redoublent dans d’effrayantes manoeuvres face à la voie opposée. Il arrive parfois que nous soyons bloqués à 30km/h derrière l’un de ces monstres pour devoir tenter le diable avec en face des voitures et autres véhicules non éclairés.

A 20h, c’est épuisés nerveusement par les nombreuses frayeurs vécues sur la route que nous rendons les clés de la voiture et nous faisons ramener à JEF. Nous nous jetons au restaurant “les prémices” oùnous commencçons mine de rien à avoir nos habitudes puis rentrons rapidement au riad émerveillés par la beauté d’Essaouira et vidés des sensations fortes de la route du désert.

La note du photographe amateur :

Wahou ! … non non rien d’autre, juste Wahou ! Qu’est ce qu’on peut dire d’autre quand les photos se prennent toutes seules. Reste juste à retranscrire au mieux l’ambiance et ses sensations.

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La galerie complète de cette journée : 93 photos.

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Sherlock le Marocain : jour 9 - Souk Machine

Sherlock le Marocain : Jour 8 - Vous reprendrez bien un peu de tourisme ?

Sherlock le Marocain : Jour 7 -  t’as pas un Dirham ?

Sherlock le Marocain : Jour 6 - Le Roi Atlas - part 1

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