A l’ombre de l’arbre de la liberté

Cette année le 14 juillet n’aura pas été, pour nous, synonyme de feux d’artifices ou de défilés. Non. Au pas cadencé des soldats nous avons préféré la douceur d’une après-midi au parc.
Pour nous mettre dans un esprit 100% vacances, nous avons donc pris notre plus beau sac de plage, y avons glissé serviettes, livres, DS, appareil photo, catalogue Ikea et ipods, avons enfilé nos plus belles tongues et sommes partis pour le parc juste à côté de chez nous.
Vous rappelez vous ces arbres que nous, enfants, avions planté pour le bicentenaire de la révolution française (oui oui je parle bien de 1989 bande de jeunots) ? Et bien, une fois au parc j’ai eu comme une envie subite de trouver celui qui serait, en ce jour de fête nationale, notre arbre de la liberté à nous pour cette après-midi. Je me suis dit que, sous cet arbre, nous pourrons profiter de cette liberté durement acquise par nos ancêtres, discuter, et nous reposer tout en étant conscients que tout cela n’est ni donné à tous ni éternel.
Nous faisons donc quelques dizaines de mètres et nous arrêtons devant l’arbre parfait : ses feuilles fines nous protègent de la dureté de la lumière de l’après-midi tout en laissant jouer les rayons avec l’ombre sur nos peaux de travailleurs pâles. Nous installons nos serviettes, nous allongeons et vaquons à nos activités de vacanciers d’un jour.
Bucolique, zen, tranquille. Voici quelques mots auxquels peut être associée notre arbre de la liberté. Sous ses branches, j’observe les nuages dessiner des formes laiteuses, les rayons du soleil s’emprisonner dans la nasse des feuilles qui n’en laissent passer que les plus bienveillants.
Ma tête se promène sur ma serviette, mes mains affleurent l’herbe et Simon & Garfunkel donnent une ambiance musicale parfaitement adapté à cet instant de liberté sublime.
Ici et maintenant, je peux penser, être moi, voir la vie s’écouler quelques instants et me dire que tout est juste bien, à sa place. La liberté comme le bonheur, on en profite sûrement plus en petite monnaie qu’en lingots (comme dirait un grand penseur que je vous laisse identifier). La pièce de monnaie de ce moment est sûrement un peu rare, un peu particulière et j’ai donc envie de la garder dans un coin de ma poche.
Aussi, de la surface de ma serviette aux couleurs azurées de la mer, je prends des photos de ce qui m’entoure, juste à l’inspiration, sans bouger, sans calculer. Parce que c’est aussi ça la liberté. A mes côté, ma moitié est en pleine étude du catalogue Ikea et me sollicite de temps en temps pour savoir ce qui conviendrait le mieux à notre futur appartement. Ainsi libres de nous projeter dans notre avenir proche nous goûtons, par la pensée, à ce qui fera notre vie dans quelques mois. Vivement bientôt.
La musique est douce, les nuages défilent toujours dans un spectacle ordonné et régulier et les gens autour de nous se déplacent dans un presque silence bienvenue.
Notre bulle est là sous notre arbre de la liberté avec nos pensées, nos rêve ou nos moments de vide bienfaiteur, instants brefs pendant lesquels nous ne pensons à rien et ne faisons que ressentir ce que nous offre notre gardien naturel.
3 heures plus tard nous nous levons, presque ensommeillés, un peu tristes de crever la bulle. L’arbre nous avait averti un peu auparavant qu’il fallait mettre fin à cet instant : il avait fini par retenir tous les rayons d’un soleil devenu plus paresseux, introduisant ainsi doucement le poison qui nous ferait nous même tuer ces doux moments, perturbés par une ombre devenue trop présente pour conserver l’équilibre magique.
Nous reprenons donc nos serviettes, les remettons dans le sac de plage et savons à cet instant que les vacances du 14 juillet sont terminées.
Sur le chemin du retour, je me sens habité d’une mélancolie douce et pense à tous ceux qui ont permis que ce jour, ces moments puissent être ce qu’ils ont été : des instants de liberté pour nos corps et nos esprits. L’important est d’en être conscients et d’en prendre une bonne razade quand on peut en profiter.
Toutes les photos de cette belle après-midi dans la galerie du Sherlock.